mardi 2 juin 2020

POÈME EN GUISE DE COMPTE À REBOURS #15

Bonjour

La vie, une certaine vie, « reprend peu à peu ses droits », comme « on » dit dans et sur les médias. Je me suis engagé à aller jusqu’au bout de ce compte à rebours mais son terme arrivera plus tôt qu’initialement prévu. Ce sera le 21 juin, premier jour de l’été, et jour de la Fête de la musique, que Sylvie et moi partagerons, via internet, avec la harpiste de jazz Isabelle Olivier et des musicien.nes et chanteurs.euses (je vous donnerai le lien peu avant). Et pour ce faire, je vous adresserai un poème par jour par cycle de 3 ou 4 jours consécutifs. Belle suite de vie à toutes et à tous. JF

 

 O comme OKOUNDJI Gabriel Mwénè

 

Les étoiles dans mon village n’ont pas de nom

enfants, nous les désignions par plusieurs centaines de lettres

leur lumière est source d’une pluie d’éclats sans tonnerre

leur lumière mûrit la nuit et son rideau de songe

 

et quand vient la lune qui révèle l’étendue de l’horizon

les rires et les chagrins d’enfants interrogent le ciel

à savoir si l’aurore sera de lumière vive

à savoir si le crépuscule précède la mort

à savoir si … (fin de souffle)

 

de là où je suis, un mur blanc se heurte à mon regard

je ressemble à un oiseau qui lutte en toute vanité contre le vent

 

Ext. de L’Aube est calme, in Prières aux ancêtres, éd. fédérop, 2008, Prix PoésYvelines 2009

 

Difficile de ne donner à lire qu’un « poème » de Gabriel Mwénè Okoundji, tant chaque texte est souvent inclus dans un tout qui s’articule sur plusieurs pages, créant des dialogues d’un « poème » à l’autre. Il s’agit alors d’un chant psalmodique, créé par un poète qui ne se dit pas poète mais passeur, « porteur de souffle »*. Et ce souffle, on peut l’entendre sur le CD Souffle de l’horizon Tégué, destinée d’une parole humaine, AFAC, 2008, Coup de cœur de l’Académie Charles Cros ; on peut le lire dans cette Prière aux ancêtres ou dans Chant de la graine semée (fédérop, 2014), ou dans la parole redonnée à Ampili, la tante-mère, et à Pampou, le sage des terres de Mpana, dans Stèles du point du jour, William Blake & Co, 2011. Gabriel Mwénè Okoundji est nourri de sa terre de naissance parce que, dit-il** « l’homme est à l’image de l’arbre. Lorsqu’un arbre prend racine quelque part, si on le déterre pour le transporter ailleurs, il garde en mémoire la sédimentation de départ, l’humus et la vase qui ont permis la sève originelle ; tout cela ne s’efface pas fondamentalement de cet arbre-là. Bien que vivant en France depuis de nombreuses années, bien qu’étant naturalisé, bien qu’ayant une étroite collaboration avec mes compagnons en poésie, bien qu’exerçant ma profession de psychologue clinicien à l’hôpital Charles Perrens***, bien qu’étant chargé d’enseignements à l’université, il n’en demeure pas moins que je me vis avant tout comme un Africain, en harmonie avec la culture française qui m’environne. »

 * cité par Joan-Pèire Tardiu, in préface à Comme une soif d’être homme, encore, anthologie, éd. fédérop, 2015

** in, Né Mwénè, propos recueillis par Elsa Gribinski, in la revue Spirit, n°72, juin 2011 repris dans Apprendre à donner, apprendre à recevoir, suivi de La Parole est après le chemin, éd. APIC, 2014.

*** à Bordeaux

 

À demain

Jacques Fournier

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