mardi 9 juin 2020

POÈME EN GUISE DE COMPTE À REBOURS #10

J pour JONKER Ingrid

 

Bonjour

Beaucoup connaissent Ingrid Jonker pour un poème : Die Kind / L’enfant n’est pas mort, rendu célèbre le 24 mai 1994, Nelson Mandela le disant le jour de son investiture à la présidence devant le premier parlement sud-africain élu démocratiquement. J’ai fait le choix d’un autre texte.

 

OH DEMI-LUNE

 

La demi-lune est le disque du jour

qui flotte oublié là-haut dans le noir

mais ce soir je sens ton corps chaud me dire

Encore encore encore

 

Je m’ouvre telle une étoile entre tes hanches

ton corps m’a baptisée dans ton corps

jusqu’à loin sur le chemin de la nuit

Reviens reviens reviens

 

Son de tes yeux rythme de ton torse

blessure de tes mains de tes cuisses

oh soif de tes lèvres la nuit perce sa croûte

Oublie oublie oublie

 

In L’enfant n’est pas mort, trad. de l’africaans par Philippe Safavi, dessins Frédéric Boulleaux, Le Thé des écrivains et Zootrope films, 2012

 

La vie d’Ingrid Jonker (1933-1965) fut courte et tumultueuse, entre une mère décédée quand elle avait 11 ans, un père (auquel elle s’oppose) président de la commission de censure du parlement sud-africain, mariage, amants, écritures, voyages en Europe et état dépressif qui la conduit au suicide par noyade. Elle est considérée comme une voix importante de la lutte contre l’apartheid, au même titre qu’André Brink, Breyten Breytenbach, et de quelques autres, souvent membres du groupe die Sestigers.

Hormis cette fine plaquette de 44 pages proposant la traduction de 16 courts poèmes (dont Die Kind L’enfant n’est pas mort), aucune autre édition n’existe en français de ses poèmes, alors qu’elle publia de son vivant deux recueils (en 1956 et 1963), qu’elle reçut le Grand Prix des Libraires, la plus haute récompense qu’un auteur en langue afrikaans pouvait obtenir à l’époque. Elle écrivit aussi quelques nouvelles et une pièce de théâtre. Un documentaire (2007) et un film de fiction (2012) lui sont consacrés. « Je suppose qu’elle appartient maintenant à l’éternité. » écrivit André Brink, dans sa préface à Ingrid Jonker - Black Butterflies Selected poems, 2007 (ext. de la préface trad. par Gilles Boulenger).

 

À (après-) demain

Jacques Fournier

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire