dimanche 7 juin 2020

POÈME EN GUISE DE COMPTE À REBOURS #12

L pour LOIZEAU Sophie

Bonjour

 

- Tu mets des miettes dans mon lit ! Va manger ta tartine ailleurs !

Elle essuie ses mains grasses sur son pyjama avant de me tendre un livre.

- Lis-moi !

- Je termine ça et je te lis.

Mon bras fait anse, elle se blottit à l’intérieur. Ses petites oreilles en velours cessent de se tourner vers d’autres sources. Le livre drague tout.

Dans une grande forêt habitait un pauvre bûcheron.

***

J’ai pris un pétale dans le courant d’air pour un papillon vivant. Sa palpitation, c’était suffisant pour y croire.

- Merci endroit ! Je quitte l’herbe écrasée sous moi. Les pâquerettes parviennent à se relever, cette action les accapare tout entières, les fait trembler. Les voilà presque remise de la foulure.

***

Je revisite sur le terrain les endroits où mon écriture est passée et je suis frappée de les reconnaître. Je suis frappée par la vérité qui s’en dégage.

La chose écrite fonctionne, sa coïncidence avec le réel ne fait pas un pli.

 

 Extraits de La chambre sous le saule, PURH, 2017

 

Un journal entre vie intime ; réflexions sur/pour l’écriture, ce geste vital (La nécessité d’écrire est plus forte. Même abrutie de sommeil je sens qu’elle est plus forte) autant qu’aimer et être aimée ; mots d’enfant créant un autre rapport aux mots et à la vie ; lien intime et solitaire aux éléments naturels (Écrire, c’est être seule et dans l’oubli de tout. (…) À moi, un bois me va, un coin de pelouse près d’un étang, une grève.) ; Nin-nin papa ; les fantômes « qui ne font pas autrement que d’apparaître à l’angle mot » de la chambre, …

Mais Sophie Loizeau, d’un livre à l’autre, c’est aussi une intimité forte à la langue (celle qu’elle s’invente et dans laquelle elle rend visible le féminin, principalement dans sa « trilogie de Diane » : La femme lit et Caudal, Flammarion ; Le Roman de Diane, Rehauts), aux corps, aux bêtes, des Environs du Bouc (L’Amandier, 2005, Prix Yvan-Goll 2005) aux Loups (Corti, 2019).

À demain

Jacques Fournier

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire